
La sécheresse oculaire (DED) représente une entité clinique distincte caractérisée par un ensemble de signes et symptômes cliniques. Selon la TFOS DEWS II, la définition suivante cerne notre compréhension actuelle de la DED:
La sécheresse oculaire est une maladie multifactorielle de la surface oculaire caractérisée par une perte d’homéostase du film lacrymal et accompagnée de symptômes oculaires, dans laquelle l’instabilité et l’hyperosmolarité du film lacrymal, l’inflammation, les lésions de la surface oculaire et les anomalies neurosensorielles jouent un rôle étiologique. 1
L’hyperosmolarité, le premier suspect?
Un phénomène central considéré comme indissociable de la pathophysiologie de la DED est que l’évaporation engendre l’hyperosmolarité lacrymale, ce qui perpétue le cycle de l’inflammation.
On a également démontré que cette variation d’osmolarité, en particulier chez les patients présentant une sécheresse oculaire sévère, était un facteur qui pouvait influencer les mesures kératométriques et donc la mesure de la puissance d’un implant.
En effet, une étude du Dr Epitropulos, a démontré que les patients présentant une hyperosmolarité révélaient une plus grande variabilité de leurs mesures kératométriques entre deux visites pré-opératoires et ce comparé au groupe présentant une osmolarité normale.2
Ainsi, 10% des yeux présentant une hyperosmolarité voyait le résultat du calcul de la puissance de l’implant varier de plus de 0,5 Dioptrie.2
D’autre part l’étude a révélé que 17% des yeux présentant une hyperosmolarité (> 310 mOsm/l) montré une variation de plus d’une dioptrie de leurs mesures kératométriques (cylindre) entre deux visites pré-opératoires.2
Par ailleurs, une étude du Dr Eldridge a confirmé cette tendance en démontrant que l’acuité visuelle non corrigée (UCVA) chez les patients ayant une hyperosmolarité était nettement moins bonne que celle des patients avec une osmolarité normale et ce 3 mois post-LASIK. Ce qui tendrait à démontrer que les patients présentant une hyperosmolarité pouvaient être à l’origine de surprise réfractive en post-op.3
Ceci est d’autant plus remarquable que la variabilité est un élément important de la pathologie de la sécheresse oculaire. En effet, si l’on mesure l’osmolarité chez des patients présentant une sécheresse oculaire avec une sévérité de légère à sévère , on constatera que non seulement que les valeurs diffèrent mais aussi que la variabilité dans les mesures augmente (voir schéma ci-dessous).4

Un simple test : la meibographie
Pour le Dr Carones, directeur d’un centre chirurgical à Milan, parmi l’ensemble des tests disponibles, un test d’osmolarité donne des résultats chiffrés concrets, des résultats reproductibles que nous pouvons partager avec les patients pour expliquer leurs diagnostics et pour surveiller les résultats du traitement au fil du temps. En tant que médecin qui a regardé évoluer le diagnostic de la sécheresse oculaire au fil des années, les tests objectifs sont une aide intéressante. Du point de vue du patient, les nombres ont toujours un impact plus grand et plus immédiat que l’opinion subjective d’un médecin, même le plus expérimenté.5
Les nombres concrets et les images nous aident aussi à expliquer la maladie de l’œil sec aux patients. Ils peuvent voir clairement que leur nombre n’est pas dans les valeurs normales pour un test donné, ou voir grâce à la Meibographie que leurs Glandes de Meibomius sont atrophiées et/ou manquantes. C’est parfois un soulagement pour les patients qui ont souffert d’yeux secs et ont reçu peu d’aide. Pour les patients asymptomatiques, des tests objectifs offrent la preuve qu’ils ont un problème.
La chirurgie réfractive au laser
C’est surtout important pour les patients qui envisagent une chirurgie réfractive au Laser. On explique ainsi que la chirurgie réduit la production et la qualité du film lacrymal et qu’il est donc essentiel que nous prenions le temps de traiter la maladie de l’œil sec avant la chirurgie et ce pour éviter les symptômes post- chirurgicaux. Sur base de cette objectivation par un chiffre, on constate: que le patient est plus compliant car il aspire à voir « ses chiffres s’améliorer et qu’en plus, nombres de patients sont habitués à une objectivation de leur maladie par des chiffres comme dans le diabète, le glaucome, …
De plus, en commençant à objectiver cette sécheresse, le Dr Carones s’est aperçu que le problème de sécheresse existait chez bien plus de patients qu’il ne le pensait et se faisant qu’en fin de compte il obtenait des calculs d’implant plus précis et cohérant. Enfin, en en tenant compte pré-opérativement, on évitait les problèmes de DED post-opératoire.
Mesurer l’osmolarité, c’est savoir
Il existe un dispositif de test diagnostic pour la mesure quantitative de l’osmolarité (la concentration des particules actives dissoutes dans une solution des tissus oculaires chez des patients sains et chez des patients atteints de sécheresse oculaire). Il est exclusivement destiné à une utilisation diagnostic in vivo professionnelle.
Cela constitue une méthode rapide et simple pour déterminer l’osmolarité des larmes en utilisant les mesures d’impédance de la concentration saline du liquide extracellulaire contenu dans le tissu de la paupière.
Après plusieurs secondes de contact avec le tissu de la paupière, un résultat quantitatif de test d’osmolarité lacrymale est affiché sur l’écran à cristaux liquides (ACL).
Références
- J.P. Craig et al. TFOS DEWS II Definition and Classification Report. The Ocular Surface. 2017 (15): 276-283
- A.T. Epitropoulos et al. Effect of tear osmolarity on repeatability of keratometry for cataract surgery planning. J. of Catar. and Refrac. Surg. 2015(41):1672-1677
- Eldridge D, Donnenfeld E, Burr T, et al. Presurgical hyperosmolarity predicts refractive outcomes. Association for Research in Vision and Ophthalmology; 2012 May 6-9; Fort Lauderdale, FL.
- Nochez Y, et al. Evaluation of tear film quality with a double-pass scattering index. ARVO E-Abstract 3754, 2011.
- Carones F. Advantages of dry eye disease testing for all pre-surgery patients. Opthalmolgy Times Europe – Cornea – October 2017: 38-39